Madame est bien désolée d’être une femme
Je suis une femme
On m’a consacré une journée.
Le 8 mars, on me rend hommage.
Ce jour-là, je suis la reine. On loue ma féminité. On m’offre des fleurs, on m’écrit des poèmes. On crie sur tous les toits que le monde a besoin de moi. On salue la mère, la soeur, l’épouse, l’amie qui vivent en moi. On m’applaudit pour avoir fait des études. On me félicite, car j’ai réussi à me choisir un métier, à mener une carrière…
Je souris, je remercie. Je feins d’être reconnaissante.
Ingrate? Pas du tout. Je trouve seulement qu’ils ont tort de penser qu’il me faut attendre leur journée pour me souvenir que je suis Femme alors que tous les jours, on ne cesse de me le répéter.
« Un compte en banque pour votre enfant ? Madame, on est bien désolé. » Madame n’a qu’à faire, le lendemain, une entrée prestigieuse au bras d’un mari au torse bombé qui vient poser son indispensable signature sur tous les papiers.
« Quitter le pays ? Madame, on est bien désolé. Votre conjoint n’est pas d´accord. » Et cette dernière, sur-le-champ, d’aller mendier auprès de Sa Majesté, le droit de passer les frontières.
« Transmettre votre nationalité à votre mari, un étranger ? Vous n’y pensez quand même pas, Madame! » « Et mes enfants, alors? C’est bien mon sang qui coule dans leurs veines! ». « On est bien désolé, Madame, seul un homme chez nous porte son identité dans ses gènes. »
Cette année, je suis bien désolée, Messieurs qui tenez le pouvoir de ne pouvoir continuer à prendre part à cette mascarade d’un jour qui ne me fera pas oublier ce que vous me faites endurer, tout le long de l’année.

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